La jurisprudence française exige classiquement qu’une personne désirant obtenir le changement de sexe à l’état-civil fasse la démonstration de traitements médicaux irréversibles dans la direction du genre souhaité.
Le mot irréversibilité revient souvent, le mot stérilisation JAMAIS.
Or, l’étude exhaustive des multiples traitements médicaux généralement utilisés pour réaliser un changement médical de sexe, montre sans aucune ambiguïté possible qu’AUCUN de ces traitements ne sont irréversibles, à l’EXCEPTION des traitements stérilisants.
Ou pour le dire autrement : dans le contexte de la jurisprudence française, le mot irréversibilité est parfaitement synonyme de stérilisation.
Ainsi, dans le cas d’une personne MtF (Male to Female – d’Homme vers Femme), les traitement suivants peuvent être utilisés:
L’hormonothérapie (THS = Traitement Hormonal de Substitution), ayant pour effets : augmentation mammaire, repousse des cheveux (si calvitie), maintien de l’absence de pilosité si épilation « définitive » du visage, augmentation de la masse graisseuse (env 15/20% selon la littérature) diminution de la masse musculaire (dans des proportions analogues), tous ces effets sont réversibles à l’arrêt du traitement, au besoin en prenant ensuite un traitement de compensation correspondant au sexe original, à l’exception de l’augmentation mammaire, qui elle est toujours réversible par mammectomie, qu’elle soit due aux seules hormones ou qu’elle ait été complétée par de la chirurgie.
La seule chose susceptible de devenir irréversible dans le traitement hormonal est, s’il comprend des anti-androgènes, la stérilité. Encore qu’il soit très difficile de l’établir avec certitude, on se base en général sur une période de deux ans (histoire de donner un chiffre) mais cela peut s’avérer très faux selon les personnes.
Lors de l’arrêt du traitement, les cheveux (si alopécie au départ) retombent, et au bout de quelques mois sans épilation, la pilosité du visage réapparaît.
La chirurgie de féminisation du visage peut parfaitement être “corrigée” par une virilisation du visage (rarement demandée par les hommes trans’ (FtM) qui se contentent très généralement sur ce plan des effets de leur hormonothérapie )
D’autres chirurgies secondaires, (lippofilling, prothèses mammaires …) sont parfois utilisées, elles sont également réversibles.
On peut mentionner à titre anecdotique la chirurgie capillaire (réparatrice de calvitie). Elle est effectivement irréversible, mais cela ne saurait entrer en ligne de compte, puisque, si l’alopécie est un marqueur de masculinité incontestable, en revanche, la possession d’une chevelure complète n’est en rien un marqueur de féminité : cette irréversibilité n’est donc pas signifiante d’un changement de genre, et n’est d’ailleurs jamais celle considérée comme suffisante par les tribunaux, pas davantage que ne l’est la réduction de la pomme d’Adam, dont l’absence chez un homme (cis ou trans’) n’a jamais attiré l’attention de personne.
Quant à un éventuel traitement orthophonique de la voix, les femmes transsexuelles disposent TOUJOURS d’un accès à leur ancienne voix masculine (= pas d’irréversibilité non plus)
Les seuls traitements vraiment irréversibles que peut subir une femme transsexuelle dans son parcours sont au nombre de trois :
La stérilisation (très généralement accompagnée d’impuissance) par hormonothérapie anti-androgénique au long cours (castration chimique de type Androcur)
L’orchidectomie (castration simple)
Enfin la vaginoplastie, (reconstruction anatomique d’organes génitaux féminins impliquant automatiquement une orchidectomie et une penectomie.
Par conséquent, lorsqu’un tribunal pose comme condition d’un changement de sexe à l’état-civil, l’irréversibilité des traitements suivis, il impose de facto sans échappatoire possible l’exigence d’une stérilisation, ce qui est parfaitement en contradiction avec les traités internationaux, et cette contrainte s’adressant à toute la population transgenre d’un pays relève d’une pression eugéniste.
L’Espagne nous a fourni une preuve incontestable de cette pression : lorsqu’elle a cessé de poser l’exigence d’une preuve de stérilisation comme condition pour un CEC (Changement d’Etat Civil), le nombre de demande de chirurgies de réassignation dans ce pays a diminué d’une année sur l’autre de 30 % .
Je pense qu’on peut faire une démonstration analogue concernant les trans’hommes.
Il est à noter que l’ONU, 6 ans après Jogjakarta, regarde le fait de conditionner un tel changement d’état-civil à une stérilisation comme un acte de torture.
Enfin, dernière remarque, la dite irréversibilité n’est définie nulle-part, les jugements s’en remettant à l’hypothétique consensus d’une communauté scientifique …
qui n’existent ni l’un ni l’autre .
Depuis des décennies, la France piétine impunément les Droits de l’Homme au moyen de cette astuce sémantique, qui est une imposture scientifique, juridique et morale. (Le fait de ne JAMAIS utiliser le mot stérilisation dans les jugements tout en l’exigeant objectivement est en soit la preuve que les tribunaux savent parfaitement qu’ils seraient dans l’illégallité au regard du droit international, (Droits de l’Homme, etc) et l’emploi du mot-écran « irréversibilité » est bel et bien une forfaiture des tribunaux français, Cour de Cassation en tête.
Et accessoirement, un crime contre l’humanité.
***
L’article 16 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme-1966) précise :
« Chacun a droit à la reconnaissance en tous lieux de sa personnalité juridique. »
L’article 3 des Principes de Jogjakarta (2007-Assemblée générale des Nations Unies) appuyé à cet article 16, interprète comme stérilisation forcée, le fait que celle-ci soit exigée pour avoir le droit à son changement d’état-civil.
« …. Personne ne sera forcé de subir des procédures médicales, y compris la chirurgie de réassignation de sexe, la stérilisation ou la thérapie hormonale, comme condition à la reconnaissance légale de son identité de genre. Aucun statut, tels que le mariage ou la condition de parent, ne peut être invoqué en tant que tel pour empêcher la reconnaissance légale de l’identité de genre d’une personne. Personne ne sera soumis à de la pression pour dissimuler, supprimer ou nier son orientation sexuelle ou son identité de genre. »
Voilà, si ça peut vous être utile pour un CEC sans (ou avant) SRS, servez-vous …Cocorico. Rompez.
Publié le : 23 mars 2013
Titre original : « Irréversibilité, qu’ils disent … »
Commentaires : Lio de France / DG
Source : TXY.fr
Bonjour, je suis journaliste pour StreetPress, je réalise une enquête sur les pressions que les personnes transgenres continuent à subir pour pratiquer des opérations médicales stérilisantes malgré la loi de 2016. Pourrions-nous nous entretenir à ce sujet ? En vous remerciant par avance. Bien cordialement.
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Je viens de recevoir cette demande d’interview de la part de StreetPress.
Editeur de ce blog, je ne suis qu’un transgenre ordinaire, soit un homme qui s’habille en femme aussi souvent que possible et qui ne subit aucune pression pour pratiquer quelque opération médicale stérilisante que ce soit, à la raison que je suis bien, à la fois dans ma peau d’homme et dans mes habits de femme.
Enfin, d’un caractère plutôt bien trempé, je dis merde à l’Etat qui en ce domaine, ne me fera JAMAIS prendre une décision à laquelle je n’adhérerais pas complètement.
Ceci précisé, j’invite toutes mes lectrices et lecteurs à prendre contact avec StreetPress s’ils se sentent concernés par ce soucis. Et d’expérience, je sais qu’il en est ainsi.
A vos claviers. Lio de France / DG.
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Salut @Lio
Même réflexion que pour un autre article (Au nom du peuple français … et mon cul ?), celui-ci a été largement amendé depuis (en Mai 2014) et est trouvable chez moi itou : http://www.phlune.net/?p=769
Bonne continuation, vous avez de saines lectures … 😉
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